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C’est désormais une certitude : le changement climatique est en cours, les rapports du GIEC le confirme. Comment se traduisent les évolutions du climat en Occitanie ? quels sont les enjeux pour la région Occitanie en termes d’adaptation ?

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Transcription

1 - Serge Planton, avant d’évoquer spécifiquement l’adaptation au changement climatique, pouvez-vous nous faire un point d’actualité sur le dernier rapport du GIEC ?

Le 1er volet du 6e rapport du rapport du GIEC a été publié en septembre 2021 et fait le point sur les connaissances scientifiques autour du réchauffement climatique.
Parmi les enseignements de ce rapport, certains sont nouveaux, d’autres viennent confirmer des données déjà établies.
Le rapport confirme un réchauffement planétaire de 1,1°C depuis la fin du XIXe siècle. L’objectif de la COP21 est de rester en dessous de 2°C et de renforcer les efforts pour limiter le réchauffement à 1,5°C (conformément à l’accord de Paris), donc 1,1°C de réchauffement c’est déjà une hausse importante.
Autre enseignement du rapport du GIEC : en 2019, la concentration de CO2 dans l’atmosphère est plus élevée que depuis au moins 2 millions d’années. On sait que cette hausse est liée aux activités humaines : émissions de gaz à effet de serre (GES) liées en particulier à l’utilisation de combustibles fossiles (pétrole, charbon et gaz naturel). On sait par ailleurs, et le dernier rapport le confirme, le lien de cause à effet entre l’augmentation de C02 et le réchauffement.
L’influence humaine sur le climat est un fait établi et c’est une des conclusions émises dans le dernier rapport du GIEC.
Le réchauffement a des conséquences sur l’atmosphère, les océans et les glaces, et là aussi les changements observés sont attribués aux effets des activités humaines.
Autre constat formulé : l’augmentation de la fréquence et de l’intensité de certains extrêmes comme les vagues de chaleur, des pluies plus intenses, la sécheresse dans certaines régions.
Un élément nouveau : l’augmentation observée de la fréquence des cyclones tropicaux les plus intenses qui ne paraît pas explicable par la seule variabilité naturelle (cette conclusion reste à confirmer selon les scientifiques).

Pour ce qui concerne le futur, on s’attend à un réchauffement de 1,5°C probablement atteint dès 2030. Le réchauffement va donc se poursuivre indépendamment du scénario d’émissions de GES, en raison de l’inertie du système climatique et des concentrations de GES dans l’atmosphère.
Toujours selon le rapport, à la fin du siècle le réchauffement peut être limité à 1,5°C à condition de diminuer drastiquement les émissions de GES pour atteindre la neutralité carbone à horizon 2050.

Le réchauffement pourrait être compris entre 3,5°C et 5,5°C avec le pire des scénarios, c’est-à-dire si on ne limite pas les émissions.
Pour donner un ordre d’idée de l’impact des émissions sur les vagues de chaleur : les vagues de chaleur qui se produisaient 1 fois tous les 50 ans à la fin du XIXe siècle, se produiraient tous les 5 à 6 ans avec 1,5°C de réchauffement, et pratiquement tous les ans avec un réchauffement de 4°C.

Pour terminer sur une des conclusions du rapport, de nombreux changements dus aux émissions passées et futures de GES sont considérés comme irréversibles à l’échelle du siècle, voire de millénaires.

2 - Dans nos territoires en Occitanie, comment vont se traduire ces évolutions climatiques ?

Pour ce qui concerne la région d’Occitanie, le Cahier Régional d’Occitanie sur les changements climatiques, paru en octobre 2021, est le document de référence sur les évolutions du climat, ses impacts et les pistes d’actions d’adaptation possibles pour agir.
D’après les données recueillies par Météo-France, un réchauffement de 1,8°C est observé depuis le début du XXe siècle.
Pour l’avenir, on attend un réchauffement supplémentaire de 0,5°C qui serait atteint en 2050 mais n’évoluerait pas ensuite, donc un réchauffement de 0,5°C aussi en 2100 par rapport à aujourd’hui, avec le scénario de plus basses émissions. En revanche, en cas de scénario de fortes émissions, le réchauffement pourrait atteindre 5 à 6°C par rapport au début du XXe siècle soit une multiplication par 7 du réchauffement à partir de maintenant. Les différences entre les scénarios d’émissions de GES auront donc des conséquences plus ou moins fortes sur le changement climatique en Occitanie.

Si l’on prend pour exemple les vagues de chaleur de juin et juillet 2019 qui ont conduit au record national de température observée, soit 46°, la canicule de juin avait environ 25 fois moins de chance de se produire et elle aurait été de 2°C moins chaude sans l’influence des activités humaines.
On sait aussi, selon ce même document, que cette canicule pourrait se produire tous les 4 ans vers 2035 en étant 1°C plus chaude, et tous les ans à la fin du siècle même avec un scénario médian d’émissions de GES.
On voit bien là l’effet d’amplification du réchauffement climatique sur les extrêmes chauds.

Pour les précipitations moyennes il n’y a pas d’évolution marquée. Elles ont très faiblement diminué sur une période de 60 ans, la diminution étant plus marquée dans le Sud-Est et en été
Cette tendance devrait se poursuivre à l’horizon 2050 avec toujours une faible diminution des précipitations, mais avec des contrastes saisonniers et des diminutions plus prononcées en été qu’en hiver. Après 2050, avec le scénario de fortes émissions, les diminutions seront plus marquées en été et dans le Sud-Est de la France.
Par ailleurs, concernant les épisodes extrêmes il a été observé une augmentation de 20 % environ de l’intensité des épisodes méditerranéens les plus forts, qui se produisent chaque année. Cette observation ressort d’une étude conduite sur la période entre 1960 et 2015. Pour le futur, une intensification de ces épisodes est attendue mais plus particulièrement des épisodes qui seront à échelle horaire. Ces résultats demandent à être confirmés par des nouvelles études dont certaines sont actuellement en cours.

Pour ce qui est des sécheresses le constat a été fait de leur augmentation, notamment des sécheresses agricoles (sécheresses liées au contenu en eau des sols) depuis les années 60.
Dans le futur ces sécheresses agricoles vont s’accentuer plus rapidement que les sécheresses météorologiques (liées au déficit de pluies). Avec le pire des scénarios on s’attend à un doublement du nombre de jours secs.

Autre conséquence du réchauffement climatique qui concerne l’Occitanie : l’enneigement en zone de montagne. Cet impact n’a pas été véritablement observé dans les Pyrénées Orientales par manque de données, mais aussi car la variabilité est importante selon les versants et selon les régions.
Par contre, les projections montrent une diminution de 30 % à 40 % de la hauteur moyenne de neige à l’horizon 2030 par rapport à la fin du XXe siècle. Cette diminution pourrait s’accentuer jusqu’à 90 % à la fin du siècle avec le scénario à plus forte émissions, avec des années sans neige en moyenne montagne.

3 – La SNBC à l’échelle nationale, la trajectoire régionale Région à énergie positive visent à atténuer les impacts du climat. En termes d’adaptation, quels sont les enjeux pour la Région Occitanie ?

La plupart des secteurs socio-économiques sont concernés par l’adaptation au changement climatique.

Tout d’abord l’adaptation est nécessaire car des changements climatiques vont se produire d’ici au milieu du siècle, quel que soit le scénario retenu. Cela s’explique par l’inertie du climat et le fait que les processus naturels ne sont pas suffisamment rapides pour diminuer les concentrations de CO2 dans les prochaines décennies. On subit à la fois les conséquences des émissions passées et actuelles.

Si l’adaptation doit se faire, des adaptations sont déjà en cours. On peut citer par exemple les adaptations aux effets des vagues de chaleur et à leurs impacts sur la santé. À la suite de la canicule de 2003, pour lutter contre les impacts des vagues de chaleur sur les systèmes de santé, les entreprises, les personnes vulnérables, un plan alerte canicule a été mis en place pour les avertir des occurrences des vagues de chaleur et leur communiquer des conseils de prévention. C’est déjà une première mesure d’adaptation au changement climatique, car on sait que les épisodes de fortes chaleurs vont se multiplier à l’avenir. On voit ici que la mise en place d’alertes précoces efficaces sont des solutions pour s’adapter à l’évolution de certains extrêmes climatiques.

En Occitanie, un des premiers secteurs concernés est l’agriculture qui devra s’adapter à la diminution des ressources en eau. Des solutions existent comme par exemple le choix des cultures ou des cépages plus résistants à la sécheresse.
Mais en plus des solutions d’adaptation nécessaires, à la diminution des ressources en eau, il faudra aussi mettre en place des solutions pour réduire les impacts du réchauffement climatique. Un exemple : les gelées d’avril 2021 qui ont eu un fort impact sur l’agriculture car elles sont survenues après une période particulièrement chaude en mars.

Dans le secteur du bâtiment, les extrêmes chauds ont un impact sur le confort de vie, donc il faut adapter l’habitat en privilégiant des solutions naturelles. Les bâtiments doivent aussi s’adapter aux sécheresses et aux pluies intenses qui vont s’intensifier en particulier dans les régions argileuses. On sait que les retraits et gonflement des argiles ont des impacts sur les bâtiments.
Autre impact : les pluies intenses en ville avec le risque de débordement des systèmes d’assainissement, ce qui demande d’adapter les réseaux pour pouvoir répondre à ce risque.

En Occitanie, un autre secteur très affecté est celui du tourisme du fait d’une baisse d’attractivité de certaines régions soumises aux fortes chaleurs.
Pour les secteurs de montagne, la baisse attendue de l’enneigement et le réchauffement font que certaines stations de plus basse altitude devront convertir le tourisme hivernal, axé sur la présence de neige, en un tourisme axé sur des activités pouvant se dérouler tout au long de l’année. Certaines stations ont déjà commencé.
En région côtière le tourisme devra aussi s’adapter à certains effets du changement climatique comme l’accentuation de l’érosion côtière, l’aggravation du risque de submersion, l’intrusion d’eau salée dans les aquifères côtiers qui peut contaminer des nappes phréatiques d’eau douce.
Ces conséquences doivent être analysées pour trouver des solutions d’adaptation.

Tous les secteurs sont concernés, mais un dernier secteur qui touche particulièrement l’Occitanie est celui de la santé humaine, avec le risque lié à la prolifération de pollens allergisants ou l’expansion de certaines maladies du fait de l’adaptation de vecteurs à de nouvelles conditions climatiques comme le moustique tigre.

Pour conclure il est important de souligner qu’adaptation et atténuation ne s’opposent pas mais sont complémentaires. Et il est important de les considérer ensemble pour éviter la mise en place de mesures antagonistes.