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L’esprit et les enjeux de la cohorte régionale

Les collectivités territoriales qui agencent les territoires ainsi que les acteurs économiques sont les pilotes des transitions. Ce sont elles qui ont la main pour organiser et mener les enjeux de transition. La fabrique des transitions déploie un dispositif d’accompagnement des collectivités. Ce dispositif provient des expériences des territoires pionniers dans la transition. Nous cherchons à faire émerger un dynamique pilote. Ainsi, nous partons du principe que chacune des collectivités sait comment faire, sait ce qu’elle peut faire, mais n’a pas toujours les capacités de le mettre en mouvement. L’idée est de pouvoir travailler sur différentes échelles à la fois locale et régionale. Ainsi faire émerger une dynamique qui puisse interpeller au niveau national la façon dont les politiques publiques de transition se mettent en place.

Ce n’est pas un dispositif en plus, il vient aider les territoires au niveau local et au niveau régional. L’illustration en Occitanie est celle du Plan habitat durable porté par la région, et dans lequel nous venons effectivement mettre de l’huile dans les rouages. Lorsque nous menons des projets, nous faisons en sorte de venir s’intégrer dans ce qui se passe déjà dans les territoires et pas d’arriver avec un projet tout fait et imposé. Nous sommes dans une logique d’échange et de discussion avec l’ensemble des partenaires pour faire en sorte que tout cela s’articule bien.

Un changement systémique ?

Nous sommes sur un enjeu de coopération d’échelles et donc d’essayer de mailler le local, le régional et le national. Nous ne sommes jamais compétents uniquement sur la sphère « régalienne » ou « légitime ». Nous sommes toujours pris dans un écosystème qui nous encastre, qui nous enchâsse, qui nous contraint ou qui nous facilite la vie. Et cette dynamique de relation d’échelles se situe au cœur de la conduite de changement. C’est un travail de conduite de changement au sens où il faut accepter que l’ancien modèle est obsolète. et assumer que le nouveau modèle n’est pas encore complètement apparu ; il est en train de germer.
Ce que nous appelons conduite de changement systémique, c’est un travail qui consiste à la fois à changer le cadre de pensée et à assumer une certaine posture d’exploration. C’est aussi comprendre l’organisation. Étudier comment nous nous organisons avec différentes composantes : les acteurs économiques, les acteurs publics, les citoyens, l’État.

Enfin, c’est de l’action parce que nous avons besoin de montrer qu’il y a des preuves, il y a des opérations qui se mettent en place. Nous obtenons des résultats et ce sont ces petites preuves qui vont nous baliser le chemin vers une transformation globale. Le travail que nous faisons aujourd’hui en Occitanie vise à confronter, à regarder comment les choses s’inventent de part et d’autre et quels enseignements communs. Nous pouvons en tirer pour faire valoir une meilleure place et plus de moyens pour les territoires en transition.

Les 4 fondamentaux du changement systémique :

Nous mettons au cœur de cette transformation les quatre fondamentaux de la conduite de changement systémique appliqués à des écosystèmes.
Ces fondamentaux de la conduite de changement sont quatre principes clés :

1. L’engagement des acteurs  : ça ne sert à rien de décréter la transition ou de créer un cadre réglementaire de transition si les acteurs qui peuvent s’en emparer ne se sentent pas intimement convaincus d’un engagement qui va être dans leur intérêt.

2. Le principe de la coopération : il n’y a pas de transition sans un cadre de coopération.
La coopération est la capacité à mettre les conflits et les désaccords au travail. Coopérer, ce n’est pas être d’accord les uns avec les autres, c’est quand nous ne sommes pas d’accord sur un investissement stratégique, sur une vision du projet d’aménagement, alors faire l’effort additionnel d’aller vers l’autre, de continuer à l’écouter même si nous ne sommes pas d’accord, de l’entendre de manière active et de trouver des espaces de gouvernance, de qualification et d’arbitrage.

3. Le principe de la dimension systémique :
C’est le fait qu’en fait, nous sommes débordés par définition du cadre préalable qui est le nôtre. C’est cette approche systémique, c’est-à-dire cette disposition à sortir du cadre préalable, qui est posée.

4. Le principe de l’évaluation :
Nous posons l’évaluation non pas comme un contrôle, mais comme un soutien au pilotage de projet. Ce n’est pas une vérification que nous avons bien fait ce qu’il fallait faire, mais un révélateur de la valeur que nous avons générée. Nous pouvons raconter les transformations et les changements de regard, la capacité à porter des projets. Nous mettons la dimension systémique au cœur de la démarche.

Partir de l’engagement, coopérer, utiliser l’entrée systémique, et la révélation de la valeur sont les quatre entrées que nous travaillons systématiquement tout au long du parcours.

Ces quatre fondamentaux, nous les appliquons aux Quatre Fantastiques c’est-à-dire des élus et des agents de collectivités qui n’ont pas le même pouvoir mais qui - quand ils jouent ensemble - développent une force publique à agir ; l’état territorial qui est aussi convoqué de manière nouvelle sur ces questions de transition ; et les acteurs socio-économiques c’est-à-dire les associations, les entreprises, les collectifs citoyens : toute cette typologie d’acteurs qui ne sont pas les acteurs publics mais qui ont en fait un rôle, une fonction à jouer dans la dynamique territoriale.

Engagements des territoires dans la cohorte : pourquoi embarquer ?

En Occitanie, huit territoires se sont engagés avec l’idée d’engager la transition sur leur territoire. Tout cela fonctionne dans un écosystème d’acteurs à travers une alliance nationale de la Fabrique des transitions.
En Occitanie, il y a un certain nombre d’acteurs associatifs, cabinets de consultants et autres qui sont dans l’esprit de la fabrique des transitions et qui sont alliés de la Fabrique - qui sont notamment déjà aujourd’hui pour certain certains embarqués dans les analyses sensibles et pour d’autres seront en accompagnement aussi de l’appui au projet. Tout cela, c’est un écosystème d’acteurs qui évoluent ensemble et que nous asseyons d’articuler, de faire évoluer, sur l’ensemble du dispositif et en continu. La cohorte doit être utile dans les territoires, avec les délégations d’acteurs et pour les projets pilotes. Mais il faut aussi, en tirer des enseignements.

Le Tronc commun, c’est comment tous ensemble nous partageons un savoir mais aussi des expériences. Que cela soit via l’analyse sensible dans laquelle un certain nombre d’entre-nous sont engagés ; que ce soit le pair à pair et la question de la communauté telle qu’on est en train de la constituer. Nous faisons en sorte que les Quatre Fantastiques se retrouvent dans des temps dédiés à l’échange entre agents, entre élus, entre acteurs socio-économiques, entre agents de de l’État territorial ; parce qu’à cet endroit-là, il est possible de partager des choses qui, peut-être, ne seraient pas partagées en toutes circonstances. La mise en œuvre des enseignements autour du projet pilote, c’est passer du concept ou de la théorie à quelque chose de très concret et très ancré dans la transformation.

À travers le Tronc commun nous comprenons les effets auxquels nous sommes confrontés, nous apprenons à comprendre les limites rencontrées dans les enjeux de transition. Sur le cadre d’organisation, une fois que nous changeons de regard, nous pouvons commencer à organiser les choses différemment. Le cadre organisationnel évolue, la façon d’organiser le travail, les réunions d’équipe, les réunions d’échelles changent. Ça peut être concrètement un réajustement des fonctions entre élus et agents au sein d’une collectivité. Ça ne veut pas dire que nous évacuons les responsabilités hiérarchiques et les prises de décisions. Cela implique de la coopération entre les strates hiérarchiques, entre élus et les agents.

Et puis il faut mettre en œuvre le cadre d’action, qui est le plus compliqué à obtenir car il nécessite un certain temps. Il ne faut pas se projeter tout de suite dans l’action mais prendre le temps du positionnement politico stratégique, de la dynamique collective que nous allons ensuite mettre en œuvre. Il y a un temps préalable qui peut faire apparaître le fait que l’action n’est pas tout de suite au rendez-vous. Ce temps de travail murit collectivement. Quand elle est mure, elle devient puissante, et c’est là que nous attaquons la dimension systémique.